La Schuppan 962CR est une supercar construite entre 1992 et 1994 par un pilote de course australien Vern Schuppan, qui a longtemps piloté des Porsche 962C et a même remporté les 24 Heures du Mans 1983. Il a souhaité rendre hommage à la voiture de course et la rendre légale sur la route en développant une supercar portant son nom : Schuppan.
Porsche 956, 962 & 962C de course
Les Porsche 956 & 962C (assez proches techniquement) sont sans doute les voitures de course les plus titrées de l’histoire des 24 Heures du Mans. Certains constructeurs (Schuppan, Dauer) ont développé dans les années 1990 des versions routières qui ont hérité de leurs structures de carrosserie, de leurs châssis et de leurs groupes motopropulseurs.
L’un de ces constructeurs artisanaux était Vern Schuppan, un grand pilote australien, victorieux à travers le monde au volant de la Porsche 956, dévoilée en 1982. Il était non seulement pilote d’usine Porsche, mais participait également au développement de la voiture de course. Il a remporté les 24 heures du Mans 1983 avec la Porsche 956 Groupe C numéro 3 au couleurs de Rothmans, avec les pilotes Hurley Haywood et Al Holbert. La même année, il a participé à l’Endurance Race qui a débuté au Japon et a remporté le premier championnat.
Il existait trois modèles de la voiture de course victorieuse : la 956, suivie par la 962 IMSA GTP puis l’évolution finale : la 962C. La Porsche 962 a un empattement allongé par rapport à la 956, avec un moteur simple turbo pour l’IMSA GTP puis bi-turbo pour la 962C.
Cette famille de voitures de course a marqué son époque en étant très titrée mais aussi très puissante. Certaines voitures de course d’équipes privées ont été modifiées afin d’offrir plus de performances. Créée en 1988, l’équipe « Schuppan Racing Team » de Vern Schuppan était l’une d’entre elles.
Une fois que Porsche a annoncé qu’elle cesserait de soutenir les travaux de la 962 à la fin des années 1980, les équipes clients ont demandé à Porsche la continuation du support. Face à la popularité de la voiture en courses automobiles, Porsche a ainsi continué à apporter son soutien en fournissant les pièces, le moteur, la monocoque et même une équipe de soutien.
Certaines équipes se sont mises à modifier certains éléments de la voiture de course comme la carrosserie mais aussi à construire une nouvelle caisse monocoque avec le soutien de Porsche. Il n’est ainsi pas surprenant que Vern Schuppan était dans ce cas grâce à ses liens étroits avec l’équipe technique du constructeur de voitures de sport allemand.
Engagement de Porsche 962C en course par Schuppan
Avec l’arrêt du projet 962 en 1988, Schuppan a produit une carrosserie monocoque en aluminium. Schuppan engage via son équipe Takefuji-Schuppan Racing Team une Porsche 962C aux 24 Heures du Mans (n°33). Elle a terminé à la 10ème place.
En 1989, elle est de retour au Mans et a dû abandonner suite à un incendie. Une autre 962C (n°55) étai engagée par le pilote australien via l’équipe Omron Racing Team Schuppan. Elle termine à la 13ème place suite à du temps perdu à changer la boîte de vitesses.
En 1990, ces deux voitures ont été de nouveau engagées avec les mêmes équipes et numéros : 12ème place pour la n°33 et 15ème place pour la n°55.
En 1991, deux voitures ont été engagées sous le Team Schuppan : les n°53 & 53. Elles ont du toutes les deux abandonner.
La même année, il a fait appel à une société sous-traitante basée aux États-Unis – Advanced Composite Technology – afin de produire une monocoque fabriquée en fibre de carbone, projet conçu à l’origine par Porsche. Un premier prototype routier avec la carrosserie de Porsche 962, de couleur rouge, était présenté à la presse. Il était nommé 962R.
Schuppan 962 CR pour un usage routier
Schuppan était le premier à proposer une 962 avec une carrosserie en carbone. Connaissant bien le marché japonnais pour y avoir couru et gagné quelques courses, Schuppan y a trouvé une bonne idée : produire une voiture sportive pour la route sur la base de la Porsche 962C de course et sa nouvelle carrosserie en fibre de carbone. La situation économique au Japon y était très favorable et il y avait trouvé des investisseurs afin de financer le projet, les mêmes ayant soutenu ses engagements en course au Japon et aux 24 Heures du Mans.
L’installation du moteur de course fabriqué par Porsche et la construction de la voiture a été mise en œuvre par Schuppan via la société japonaise Art Sports. Cette nouvelle voiture a été baptisé Schuppan 962CR, indiquant une version routière (Road) de la 962C.
Le prix était d’environ 200 millions de yens japonais (environ 1,6 million d’euros), devant la supercar la plus chère à cette époque.
Face aux concurrents comme Dauer et Koenig, la Schuppan 962CR se démarquait par sa proximité avec le voiture de course et sa carrosserie inédite en carbone a la rendant plus civilisée sur la route. Son cockpit trahissait ses origines en courses automobiles.
Malgré ses gênes sportifs, la 962CR est équipée de 2 sièges et d’un intérieur luxueux recouvert de cuir. A son volant, on se croirait dans la voiture de course, avec le conducteur placé à droite et un petit levier de vitesse issu de la course également à droite. Les portes d’accès à l’intérieur ont un cinématique d’ouverture similaire à la voiture de course.
Sous l’énorme capot arrière, la 962CR est propulsée par un moteur à plat à 6 cylindres à 24 soupapes bi-turbo, refroidi par air de 3,3 litres, développant 600 ch. Pesant seulement 980 kg, la voiture passe de 0 à 100 km/h en 3,5 s et sa vitesse maximale est de 370 km/h.
La boîte de vitesses synchrone à 5 rapports est entièrement manuelle, fabriquée par Porsche. Les suspensions, à l’avant et à l’arrière, sont équipées de doubles triangles, de ressorts et d’amortisseurs avec stabilisateur. La configuration de base est identique à celle de la 962C, à la différence que la géométrie de la suspension, la raideur du ressort et l’amortisseur ont été modifiés pour s’adapter aux routes.
Pesant 1 050 kg, la Schuppan 962CR mesure 4 280 mm de long, 1 999 de large et 1 074 mm de haut.
Les pneus et les jantes ont été spécialement choisis pour un usage routier : pneus Dunlop en 255/35 ZR18 à l’avant et 345/35 ZR18 à l’arrière. Les jantes à fixation centrale sont à 5 branches. Une trousse à outils est également incluse.
A l’origine, Vern Schuppan prévoyait de construire 50 voitures (sur la plaque constructeur présente sous la capot, il est écrit « AS 962CR xx/50« ). En 1992, 3 prototypes (se reconnaissant par leur plaque « AS962CRPx« ) ont été construits et la production du premier lot de 25 voitures sur 50 a démarré. Cependant, Art Sports a mis un terme à ses activités financières et son projet a échoué. Le timing était mauvais à tous points de vue et le marché des supercars avait décliné. Le projet ayant échoué, le modèle n’a pas pu être homologué pour courir aux 24 Heures du Mans.
Seulement 6 voitures ont été fabriquées entre 1992 et 1994 avec les 3 prototypes. Trois d’entre elles auraient été importées au Japon, le marché d’origine. Le dernier exemplaire est celle qui appartient à Matthew Ivanhoe. Il l’a d’ailleurs exposée au salon Rétromobile 2019 sur son stand. Elle est neuve et n’a jamais roulé.
Bien que ce véhicule soit homologué pour un usage routier, sa conduite reste très délicate voire dangereuse, en raison de ses performances dérivées des voitures de course.
Photos : 4Legend.com / Bingo Sports / DR
