Porsche 901 Cabriolet de 1964 châssis 13360 – Un prototype roulant unique

Porsche 901 Cabriolet de 1964 châssis 13360 – Un prototype roulant unique

Tout le monde connaît le modèle emblématique de Porsche : la 911. Mais la Porsche 901 est beaucoup moins connue alors que c’est la première version de la légendaire 911. Une Porsche 901 Cabriolet de 1964 a aussi existé en tant que prototype portant le châssis 13360 et c’est l’histoire de cette dernière que vous allez découvrir.

Histoire de la Porsche 901
En septembre 1963, Porsche présente au public sur le Salon IAA de Francfort le modèle qui succède à la mythique 356, la Porsche 901. La 901 est équipée d’un moteur Flat 6 de 2 litres refroidi par air, monté à l’arrière comme sur les 356. Pour la petite anecdote, le moteur présenté sur la 901 à l’IAA 1963 était factice car pas encore fonctionnel.

Ce moteur boxer à simple arbres à cames en tête et à carter sec développe 130 ch et est le premier moteur 6 cylindres produit en série par Porsche. Il est alimenté par six carburateurs Solex 40PJ. Ce Flat 6 est accouplé à une boîte de vitesses manuelle à 5 rapports avec un différentiel autobloquant ZF.

La 901 est équipée d’un nouvel essieu avant de type McPherson. A l’arrière, on trouve des bras oscillants longitudinaux.

La production en série de la 901 débuta un an plus tard en septembre 1964. Lorsque Porsche présenta ce véhicule en octobre de la même année au salon de l’automobile de Paris, le constructeur automobile français Peugeot a découvert la désignation du modèle et a mis son veto contre celle-ci. Peugeot avait en effet déposé un brevet sur des appellations similaires : 3 chiffres avec un 0 au milieu.

Le marché français étant important pour Porsche, la marque de Stuttgart-Zuffenhausen rebaptisa dès lors sa 901 en 911 en novembre 1964. Cette combinaison de chiffres correspond au numéro d’urgence aux États-Unis : le 911, bien connu sur ce marché important et stratégique pour Porsche.

La Porsche 911 est alors née. Porsche avait tout de même produit 82 exemplaires de la 901 en version Coupé et 1 seul exemplaire en version Cabriolet.

Porsche 901 Cabriolet châssis 13360 de 1964
Dans les premiers stades de développement de la 901, Porsche a produit treize châssis prototypes de pré-production de 901 : 7 en 1963 et 6 en 1964. Tous les prototypes de 901 étaient identifiés par le préfixe 13 dans leur numéro de châssis. Tous les prototypes de la 901 étaient des Coupé hormis le châssis 13360 qui est le seul prototype de pré-production en version Cabriolet. C’est aussi la voiture qui a donné naissance au concept emblématique de la 911 Targa, développée à partir de ce prototype de 901 Cabriolet. Cette Porsche 901 Cabriolet châssis 13360 est l’une des deux Porsche 901 de pré-production encore existante et la deuxième plus ancienne survivante des châssis 901, et bien évidemment de la 911.

Le premier exemplaire de la 901 Coupé (à partir du châssis n°300 007) est sorti des chaînes de montage le 14 septembre 1964 et seulement 82 Porsche 901 ont été produites avant que la voiture change officiellement de nom pour « 911 » à partir du 10 novembre 1964. On estime qu’environ 30 Porsche 901 existent toujours.

Le châssis 13360 est non restauré avec le moteur 902841, et est en grande partie dans le même état que lorsqu’il a quitté l’usine vers le milieu des années soixante. Les premières 901 ont un certain nombre de caractéristiques uniques à elles et ont été entièrement construites à la main. Les prototypes étaient bien sûr conçus à des fins spécifiques et étaient généralement soumis à des essais extrêmes afin d’évaluer divers éléments et des composants tels que les suspensions, les moteurs, les styles de carrosserie, etc… Une fois que Porsche avait extrait les informations dont elle avait besoin, les voitures étaient alors généralement détruites. Heureusement le châssis 13360 a été épargné par ce sort et peut ainsi témoigner aujourd’hui de cette époque.

Le Porsche 901 a été conçue à l’origine comme un coupé. Pendant sa phase de démarrage et de test avant que la production ne commence, il est devenu évident que le design et la dynamique de la voiture étaient beaucoup plus compliqués que prévu. La voiture s’est ensuite révélée de plus en plus coûteuse à développer. Les plannings étaient de plus en plus serrés, et l’entreprise cherchait des moyens de réduire leurs coûts. L’ajout d’un autre style de carrosserie comme un cabriolet au processus de développement aurait considérablement étiré les finances et les ressources de Porsche à l’époque. Néanmoins, après le salon automobile de Francfort 1963, où la Porsche 901 Coupé a été présentée pour la première fois, il y avait une pression croissante des équipes commerciales et du marketing  afin de produire un cabriolet afin de satisfaire beaucoup de clients qui le réclamait.

Développement du châssis 13360
Suite à cette pression, le prototype du châssis 13360, un châssis de Porsche 901 dont le toit a été coupé, est sorti de l’atelier des prototypes Porsche début juin 1964 pour en évaluer la viabilité. En quelques semaines, les ingénieurs ont développé pour les dirigeants de Porsche un assortiment de mécanismes de toit pour la voiture, y compris un système impliquant un arceau en option et une capote. Un groupe composé de Ferry Porsche, Ferdinand Alexander « Butzi » Porsche, Erwin Komeda (responsable des dessins techniques pour les 901/911), Hans Beierbach (responsable des designs des prototypes), Hans Tomala (responsable du département expérimental), Harald Wagner (responsable des ventes) et d’autres, tous réunis autour du châssis 13360 pour faire le tour de la voiture.

Suivant les conseils de Komeda et de Beierbach, qui ont soutenu qu’il serait tout simplement trop coûteux de rigidifier le châssis, de changer les panneaux de carrosserie arrière et de faire d’autres réglages pour accueillir un cabriolet complet, Ferry Porsche a décidé d’approuver une variante avec un arceau. Même avec la validation de l’arceau, il était évident que beaucoup plus de travail était encore nécessaire pour renforcer le châssis de manière satisfaisante. En conséquence, quelques jours plus tard, le châssis 13360 a été expédié aux ateliers du carrossier Karmann dans ce but. Karmann avait fabriqué tous les renforts de châssis précédents pour les Porsche 356 cabriolets.
La voiture a ensuite été livrée au service de recherche de Porsche, 2 mois plus tard, le 10 septembre 1964, et toujours sans mécanisme de toit ouvrant. La voiture est pour la première fois recensée chez Porsche avec une date, un numéro et sa spécification comme Type 011/KW, Cabriolet. Le mécanisme de toit et l’arceau ont été validé, pour être ensuite développés et produits en interne. 4 jours plus tard, le 14 septembre 1964, la production officielle de la Porsche 901 Coupé avait commencé.

En raison des problèmes de démarrage et de ligne de production de la 901 Coupé, et de l’attention importante que cela a exigé, selon Porsche, ce n’était pas avant janvier 1965 que Helmuth Bott (à l’époque responsable des essais routiers, qui est ensuite devenu Professeur et responsable de la recherche et du développement) ait été en mesure de faire une longue épreuve d’évaluation du châssis 13360 pour évaluer sa rigidité. Selon les archives de Porsche, en testant la voiture, Bott a constaté que la rigidité de la voiture (après être passée chez Karman) était très semblable à celle des 356 Cabriolet. Cependant il a noté des problèmes qui ont retenu son attention : beaucoup de bruit et de battements de la lunette arrière souple et de la capote qui avaient été réalisées.

Quelques semaines plus tard, le 1er février 1965, le châssis 13360 apparut à l’ordre du jour d’un mémo Porsche destiné à tous ses membres et ingénieurs. Il a été décidé dans ce mémo que la voiture aurait un arceau recouvert en acier inoxydable avec un logo Porsche, un panneau de toit amovible et une lunette arrière amovible fixée par un zip. Peu de temps après, le nom «Targa» a été inventé lors d’un brainstorming à l’occasion d’une conférence de vente afin de commémorer les victoires de Porsche au Targa Florio. Le design Targa a ensuite été enregistré et breveté (n°1455743) en août 1965 en citant les concepteurs Gerhard Schroder et Werner Trenkler comme ses inventeurs.

Prototypes de la Targa
Quelques jours plus tard, en septembre 1965, la version Targa a finalement été dévoilée lors du salon automobile de Francfort (IAA 1965)  via 2 prototypes Targa exposés sur le stand Porsche. Ces deux voitures avaient un arceau comme le modèle final. L’une de ces voitures était probablement le châssis 13360, tandis que l’autre était un prototype produit au début de 1965, et qui, selon Porsche, a été par la suite détruit dans un crash test, tombé d’une grue d’un hauteur d’environ 2 mètres!

Deux ans plus tard, le premier modèle de série de la Porsche 911 Targa a quitté l’usine, devenant ainsi un énorme succès et un modèle très important pour Porsche, représentant finalement environ 40% des ventes des Porsche 911.

Vie du châssis 13360 jusqu’à nos jours
Le châssis 13360 a été acquis chez Porsche par l’Allemand Manfred Freisinger à la deuxième moitié des années soixante. Il semblerait que ce modèle a probablement été sauvé du broyeur par Freisinger. La voiture a été acquise sans moteur, sans boîte de vitesses, sans roues, sans pneus et sans sièges avant. Néanmoins, le reste de la voiture était, et est encore, en grande partie dans son état original et non restauré, rendant le châssis 13360 le plus vieux modèle Porsche 901/911 non restauré au monde! La voiture dispose d’un certain nombre de caractéristiques uniques découvertes seulement au début des années 90 ainsi que bien sûr des caractéristiques qui sont uniques à son statut de prototype cabriolet / targa, y compris les petites vitres et les fenêtres latérales en plexiglas!

Étant largement non restaurée, cette Porsche 901 Cabriolet présente également un certain nombre d’éraflures et de petits défauts sur la carrosserie, en rapport avec son histoire fascinante de véhicule d’essais. La peinture est à environ 80% d’origine (selon les mesures de profondeur de peinture), et reste encore très remarquable en dépit de ses 50 ans. Le compteur de vitesse indique un kilométrage de 34 716 km à mi-décembre 2016. La plupart des garnitures sont très probablement d’origine. Les jauges sont datées de l’époque. Il existe également divers trous dans la garniture, dans la structure et dans d’autres endroits indiquant les tentatives des différentes configurations pour les toits, les arceaux, les commutateurs, les fils, les radiateurs, etc… Cela confirme bien son rôle de prototype.

Une fois que la voiture a été acquise par Freisinger, il l’a équipé d’un moteur d’époque, des sièges avant, de jantes Fuchs de première génération et de pneus. Le choix du modèle des jantes Fuchs montées sur la voiture est une histoire intéressante. Bien que la voiture ait été récupérée sans roues et sans pneus, le compartiment avant possédait une roue de secours qui était une des premières jantes Fuchs : inconnue et donc probablement expérimentale.

Les mots «Fallversuch» (test de chute) ou «test case» (test) étaient griffonnés sur le flanc du pneu Dunlop d’origine! Il est donc probable que la voiture ait également été utilisée comme véhicule d’essai pour le test des premières jantes Fuchs. En conséquence, Freisinger a décidé d’installer des jantes Fuchs sur la voiture en tenant compte de la roue de secours. Il est impossible de savoir quel moteur spécifique ou quelle boîte de vitesses avait la voiture avant d’avoir son moteur enlevé, car il était assez courant pour l’usine d’échanger des moteurs / des boîtes de vitesses sur ses prototypes, en fonction de leurs besoins d’essai. Il n’y a ainsi pas de « matching numbers » sur des véhicules prototypes qui n’ont jamais été vendus au public, contrairement aux véhicules de série.

Après son acquisition, Freisinger a stocké la 901 Cabriolet dans l’un de ses entrepôts où elle n’avait pas bougé jusqu’en 2001, parmi ses nombreuses autres Porsche. Elle a en ensuite été acquise par Myron Vernis d’Akron dans l’Ohio (USA), un collectionneur bien connu de voitures rares, via un échange avec une Porsche 356 B Carrera. Une fois que Vernis a pu amener le châssis 13360 aux États-Unis, il a remis en route le moteur existant ainsi que la voiture axant ses efforts sur la préservation de cette dernière. Il n’a ainsi pas modifié la peinture ou la carrosserie, voulant la garder d’origine. La voiture a ensuite été acquise par le propriétaire anglais actuel en 2014 et reste toujours telle qu’elle était. La voiture a été présentée à Pebble Beach sur le stand Porsche en 2013 pour les 50 ans de Porsche. Elle est également bien connue du Porsche Museum en Allemagne.

En résumé, il s’agit d’une voiture historiquement très importante pour Porsche car elle est l’origine de la naissance de la légendaire Porsche 911. Le châssis 13360 représente un jalon important et une pièce historique pour Porsche.

La voiture sera mise en vente le 8 février 2017 par RM Sotheby’s  dans le cadre du salon Rétromobile à Paris et représente donc une opportunité exceptionnelle pour un collectionneur Porsche de l’acquérir mais aussi aux passionnés de Porsche de la contempler de près. L’historique de cette Porsche 901 Cabriolet numéro 13360 est parfaitement connue avec de nombreux documents et témoignages. Le numéro de châssis est bien visible sur la voiture. Son prix de vente estimé se situe entre 850 000 et 1 000 000 €.

Malgré le scandale du Groupe Volkswagen, Porsche pourrait participer à la vente aux enchères afin de l’acquérir, car elle ne sera pas remise en vente de sitôt.

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